Carnet de bord

DE LJUBJANA À ISTANBUL

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Il est définitivement l’heure de quitter Sébastien et sa charmante guesthouse.

Mais avec mes copains Cyclonomades, nous voulons encore passer du temps ensemble. Nous décidons donc de nous organiser, malgré le faible kilométrage qu’ils peuvent effectuer par jour sur leurs vélos, pour se retrouver le soir à un endroit précis.

Le rendez-vous est pris sur un terrain de football/basket en bitume, à 60km de la capitale.

Nous partageons une soirée de plus ensemble à parler de tout et de rien, rire, jouer au basket avec une balle trouvée sur le côté, bref, tout simplement profiter entre copains.

Alors que je regarde mon itinéraire pour définir quel sera mon programme du lendemain, je m’aperçois que Zagreb, la capitale Croate, est seulement à 90km de notre petit terrain de jeu. Sans avoir beaucoup à convaincre mes deux compères, je leur propose alors qu’on se rejoigne de nouveau là-bas pour découvrir la ville ensemble. Bien évidemment c’est un oui général qui l’emporte et qui nous rempli de joie à l’idée de passer ENCORE un peu de temps ensemble.

Le lendemain matin je prends la route pour Zagreb en même temps qu’eux, et j’arrive avant, logiquement. Ce qui m’a le plus frappé ce jour là c’est la différence de conduite entre ces deux pays voisins que sont la Slovénie, et la Croatie. La conduite Croate est bien plus « aggressive ». J’ai l’impression que cette fois-ci nous sommes bien entrés dans les pays des Balkans. Je retrouve d’ailleurs pour la première fois depuis mon départ un bouchon à l’entrée d’une grosse ville. La banlieue Zagreboise, on ne va pas se mentir, n’est pas exceptionnelle. On voit encore que le pays, bien qu’il se situe en Europe, n’est pas encore totalement remis du siècle précédent qui a été sans pitié avec ce peuple et ces infrastructures.

Notre Hostel étant dans le centre, je me suis débrouillé pour que il y ait de quoi mettre en sécurité ma moto et les vélos des deux zigottos. C’est une véritable obsession depuis que je suis parti, à chaque établissement je me renseigne à fond sur l’emplacement de l’hôtel : dans quel quartier est-il ? Y a t-il des parkings privés ? Si non, il y a t-il possibilité de se garer en face de l’hôtel etc. Je veux pouvoir dormir sur mes deux oreilles la nuit, car c’est également une part importante de la réussite de ce projet. Enfin, nous visitons la ville en deux jours, j’avoue ne pas être tombé amoureux de celle-ci, c’est une ville sympa mais sans plus.

Cette fois-ci, nous nous séparons vraiment mes deux acolytes et moi.

Je me dirige tout droit vers la Serbie pour y camper le soir même. Une fois arrivé je trouve un camping public au bord d’un lac, juste après avoir traversé la frontière Serbo-Croate, qui une fois encore, marque une dichotomie très prononcée entre les deux pays rien qu’au contact des douaniers, c’était perceptible.

Alors que les douaniers croates étaient plutôt nonchalants et me firent passer sans même un regard, ce fut bien différent quelques mètres plus loin à la douane Serbe, où j’avais à faire à des gens très très sympathiques et souriants. En leur donnant mon passeport, ils reviennent me voir amusés en regardant tous les tampons qu’il y a dessus, en regardant mon nom de famille (qui ne colle pas spécialement avec ma teinte de peau) et mon âge. Ils sont très curieux et très amicaux également, et quelques minutes après avoir discuté, ils me laissent repartir en me souhaitant bonne chance pour mon voyage.

Un accueil merveilleux !

Quelques minutes plus tard, j’aperçois un lac. Je décide donc d’y passer la nuit. J’emprunte une route un peu sinueuse et chaotique pour mes pneus qui sont fait pour la route, mais tout se passe bien. Alors que je commence à m’installer une personne vient me parler, puis une seconde, et puis encore une autre ! Tous viennent me souhaiter la bienvenue dans leur pays ! Je suis subjugué par un tel accueil, car surtout je ne m’y attendais pas ! Avec l’un d’entre eux, qui parle mieux anglais que les autres, je continue la discussion et nous passons une bonne heure ainsi. Puis, il me dit « Bon, tu vas venir dormir à la maison ok ? » « Carrément ! » Et me voilà en train de tout remballer pendant que ce monsieur et ses enfants finissent de barboter dans le lac.

Nous partons, et nous avons déjà bu un peu de bière, lui bien plus que moi ;). Je me mets à le suivre, MON DIEU QU’IL ROULE VITE, il est à 120 sur des routes qu’il connait par cœur certes, mais tout de même, c’est fou !

J’ai plus peur pour ses enfants que pour lui ou pour moi. Mais bon, j’ai l’impression que ce n’est pas rare. Je passe donc la soirée en compagnie de cette famille, nous mangeons un plat traditionnel Serbe… Une pizza ! Nous discutons de plein de choses, il me fait écouter de la musique Serbe et bizarrement sa femme fait tout pour ne pas être avec nous. Je pense que son mari s’est pris un savon le soir suivant car il ne l’avait pas prévenue de mon arrivée ! Je suis quand même agréablement surpris par un accueil si spontané et le lendemain je le remercie de m’avoir hébergé et me remets en route très tôt.

La Serbie se révèle bien plus jolie que l’Est Croate où il n’y a que champs et petits villages. Il y a des montagnes, suivies d’autres montagnes désertes de tout arbre. Je me souviens même m’être dit « Il y un air de Mongolie sur ce point de vue ». Ça m’a vraiment surpris.

Je me dirige vers un canyon que j’ai repéré sur internet. Une fois arrivé, je comprends que je vais devoir finir par un chemin très sinueux pour accéder à un point de vue du canyon. Avec mes pneus qui ne sont pas adaptés, je suis très précautionneux sur ma conduite dans ce petit chemin qui est assez pentu et clairement emprunté uniquement par des 4×4 et camionnettes. Je me décide à m’arrêter un moment, je suis arrivé suffisamment haut pour avoir un point de vue sympa. Je commence donc à établir mon campement. Tout est parfait, j’ai un beau coucher de soleil, j’ai ma tente et je suis en pleine nature, je me sens très bien. Seulement, la nuit arrive et là, au bout de quelques heures, je suis pris dans un nuage, la tente condense et commence à prendre l’eau, l’herbe autour est complément trempée. La nuit va être longue… Comme je ne suis pas un pro du camping, j’ai du faire des erreurs de débutant pour avoir cette vue mais bon c’est comme ça, je ne pouvais pas le savoir à l’avance. Je commence donc à chopper un rhume, et sans exagérer, je ne pense jamais en avoir eu un aussi gros de ma vie. C’est simple je ne faisais qu’éternuer, je ne pouvais pas m’arrêter et je n’avais que du papier toilette pour m’essuyer… Pierre Richard is in the place !!

Après 2 heures de sommeil je décide de mettre les voiles, il est 6 heures du matin.

Problème… : dehors on a une visibilité à 5 mètres maximum, mais je dois partir, je suis exténué de rester dans ce climat.

En une heure, je suis sur ma selle et je commence la descente de ce chemin pentu, sans visibilité cette fois, mais ce n’est pas compliqué. La route, après, elle, sera effrayante. Car les locaux ont l’habitude, eux, de ce temps le matin, et alors que je roule prudemment, je croise des camions qui roulent comme si le soleil de midi brillait. C’est fou. Je fais plusieurs fois des écarts de direction dans les virages, j’ai peur, mais, après une bonne demi-heure, le brouillard se dissipe et le soleil commence à réchauffer mes vêtements humides. C’est sûr, ce soir je ne camperai pas.

Direction Sofia, capitale Bulgare.

Je quitte une Serbie qui m’a accueilli exceptionnellement pour un autre pays. Tout va très vite et c’est difficile à assimiler. Les seuls points qui nous indiquent que nous changeons de pays sont les points de frontière où le passage se fait de plus en plus long. Une fois arrivé en Bulgarie je sais que je me rapproche doucement hors de l’Europe et je me satisfais de cela, c’est impressionnant en 1 mois d’avoir déjà parcouru des milliers de kilomètres.

Et encore une fois, à l’approche de la capitale qu’est Sofia, le niveau d’incivilité au volant augmente. Désormais les clignotants ne sont plus de mise et c’est une conduite aussi sauvage que bulgare qu’il faut adopter, agrémentée de coups de Klaxon très réguliers pour ne pas finir sur le sol à cause d’une voiture qui déboite et qui ne m’aurait pas vue. Sofia j’aimerai vous en parler longuement mais… Non. Le mois de juin est un mois assez pluvieux de ce que j’ai cru comprendre des locaux. Quand il pleut, c’est une véritable douche qui peut très bien durer 10 minutes comme un après-midi. Je n’y ai donc pas fait grand chose à part bosser sur les vidéos.

Quelques jours plus tard, direction une GROSSE étape de mon voyage : Byzance, Constantinople ou de nos jours appelée Istanbul, carrefour indéboulonnable des cultures Persiques, Arabes et Européennes. A la fois sur le continent Européen et Asiatique cette ville est culturellement et historiquement très importante, et c’est mon prochain voyage. Je ne sais pas à quoi m’attendre en me dirigeant vers cette direction. J’ai entendu parler de plein de mosquées incroyables, de mets délicieux et d’un accueil particulier. Mais avant d’y arriver, il faut passer une étape très importante : la douane turque.

C’est le début des vacances lors de mon arrivée. Nombreuses sont les voitures immatriculées « D » pour Deutschland et « F » pour France, qui ont le toit très très chargé et qui ont traversé l’Europe pour se rendre au « bled » et y passer l’été. Je soupçonne donc une queue très longue à l’arrivée, mais bonne surprise, en 20 minutes je me dirige vers le poste frontière turc pour les formalités. Il faut que je me procure une assurance turque avant de pouvoir passer complètement et cette « petite » formalité me fait attendre 1 heure 30 (là ou en Géorgie, cela me prendra 3 minutes montre en main). Il faut maintenant payer cette assurance, et bien sûr ils ne prennent pas la carte bleue. Il y a une tirette à 200 mètres, mais qui me force à retourner derrière les postes frontières turcs… Je m’y dirige donc et là des policiers me crient dessus en me demandant ce que je fais, me demandent mon passeport, je leur répète plusieurs fois : « Bank, Bank, Money, Turkish Lira » … Finalement au bout de 3 minutes nous finissons par nous comprendre, ils me rendent mon passeport et je peux m’y rendre sans encombre. Passer les douanes provoque toujours chez moi une euphorie particulière. Je me sens libéré et prêt à découvrir un nouveau pays. ça doit faire partie du job de 80 % des douaniers d’avoir l’air antipathique…

Enfin, j’attaque la Turquie.

A ce moment là, j’ai une sacré douleur à l’oreille, qui est en lien direct avec mon gros rhume sous la tente. Je suis complètement sourd mais elle ne me fait pas (encore) mal. J’attaque l’autoroute pour arriver sur Istanbul rapidement, il est assez tard (16h) et je n’ai pas envie de rouler de nuit. Je vais donc faire un petit coup d’essence (d’ailleurs c’est le retour des pompistes, métier disparu en France) et là j’y croise des motards Roumains avec qui je discute brièvement. Je décide de rester derrière eux pour faire la route. L’autoroute est vide de monde jusqu’à 60 km d’Istanbul. Nous en profitons pour faire des pointes à 150 km/h sur l’autoroute. 3 BMW 1200 GSR et une Honda 700 XLV ça fait du bruit et il est vrai que c’est rassurant de rouler avec eux car désormais j’arrive en banlieue d’Istanbul et son autoroute… J’entre sans le savoir dans l’un des temples de l’incivilité au volant. Ce que j’ai vécu auparavant est ridicule comparé à cette ville ! Sur l’autoroute les voitures se collent et déboitent sans clignotant. La bande d’arrêt d’urgence ? C’est une ligne idéale pour doubler tout le monde apparemment. Des bus qui s’arrêtent pour déposer des gens sur le côté. Un homme assis sur une rambarde de sécurité sur son téléphone, mais qu’attend t-il ? C’est fou, dès qu’il y a des bouchons, il y a des jeunes adultes et des enfants qui vendent des bouteilles d’eau.

Je m’ « auto » bénis d’avoir décidé de faire la route avec les trois autres motards, en groupe il y une forme de sécurité. Je ferme la marche, le plus compliqué étant de rester compact, ce qui n’est pas forcément facile. Nous nous adaptons finalement à la coutume locale qui est d’emprunter la bande d’arrêt d’urgence pour avancer. Après une heure dans les bouchons, je perds mes compagnons d’infortune et me retrouve à faire les derniers kilomètres seul. Mais le plus gros est fait, et puis je suis un parisien élevé au périphérique bouché !  Je n’ai pas peur ! (C’est faux je suis mort de trouille sur l’autoroute).

Une fois arrivé, j’ai la bonne surprise de tomber sur une très bonne auberge de jeunesse (Agora Guesthouse) mais très mal placée (en plein milieu du quartier touristique). Ce n’est pas grave, je suis heureux d’être arrivé dans un bel endroit !

Et que vois-je dans une allée de la guesthouse ?

Une Honda CBR 250 équipée de top case en métal, ah… Je sens que je vais avoir un nouveau copain avec qui discuter ce soir…

Mais ça, c’est pour le prochain article !

3 commentaires

  • salut ENZO … quelle rédaction , tout est clair ,ce récit est très intéressant il témoigne une grande sensibilité envers les routards de tous poils .A deux roues motorisés ou a la force des mollets ..
    Ton mérite et d’autant plus grand que tu as partagé des moments inoubliables avec ces as du pédalier .. Continu et bonne route et MERCI pour tous ces bons moments que tu nous fais partagér
    Salut et a bientôt pour images et texte Claude le parrain de Soph…

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